En réponse à la réaction des trois chercheurs en sciences économiques et en sociologie publiée hier dans la Vie des Idées, Oliver Godechot et Alexandra Louvet complètent et précisent leur position sur le localisme universitaire.
Dossier / Le localisme universitaire
En réponse à la réaction des trois chercheurs en sciences économiques et en sociologie publiée hier dans la Vie des Idées, Oliver Godechot et Alexandra Louvet complètent et précisent leur position sur le localisme universitaire.
Cet article est une réponse au texte d’Olivier Bouba-Olga, Anne Lavigne et Michel Grossetti, publié par La Vie des idées le 12 mai 2008 :
– Le localisme dans le monde académique : une autre approche
Ce texte était une réponse à l’enquête d’Olivier Godechot et Alexandra Louvet :
– Le localisme dans le monde académique : un essai d’évaluation
Le texte que nous avons publié dans La vie des idées avait plusieurs objectifs : mesurer un phénomène social intéressant et mal connu, à savoir le localisme académique, informer la principale intéressée, la communauté universitaire, de son importance statistique et susciter des débats sur la nocivité éventuelle du phénomène ainsi que sur les possibles moyens d’y remédier. Aussi nous nous réjouissons de la réaction critique et constructive de nos collègues Olivier Bouba-Olga, Michel Grossetti et Anne Lavigne. Elle montre déjà qu’une partie des objectifs de l’article est atteinte.
Les critiques formulées par Bouba-Olga, Grossetti et Lavigne (« BGL », dans la suite du présent article) sur notre texte portent secondairement sur un point de méthode, une définition du localisme trop restrictive, et, plus généralement, sur les sous-bassements implicites de notre texte. Ils nous reprochent d’avoir tenu pour acquis sans les démontrer, tant la nocivité du localisme sur le recrutement que l’intérêt d’une interdiction du recrutement local pour améliorer le recrutement. Ils proposent des arguments fonctionnels qui permettraient d’expliquer l’importance du recrutement local et ils soulignent les effets pervers de nos propositions de régulation.
L’objectif premier du texte Le localisme académique : un essai d’évaluation était avant tout, comme son titre l’indique, l’évaluation d’un phénomène. Aussi lorsque BGL écrivent que « le problème est que leur article ne démontre que la première proposition », nous nous permettons de répondre qu’il s’agissait là non d’un problème mais de l’objectif essentiel. Certains éléments comme la nocivité du localisme n’étaient suggérés qu’en introduction ou en conclusion, pour justement susciter le débat, mais ne pouvaient pas faire l’objet d’une évaluation avec les données dont nous disposons. Cette précision sur le statut de notre article étant faite, il n’en reste pas moins que BGL ont parfaitement raison d’interroger notre fil conducteur. À défaut de démonstrations empiriques qui ne sont pas toujours possibles, nous proposons des éléments de réponse dans la limite de nos modestes moyens. Nous traiterons plusieurs points : tout d’abord la question du parisianisme de notre méthode ; ensuite nous reviendrons sur la question de la relation entre recrutement local et qualité du recrutement ; puis nous discuterons du modèle de BGL pour expliquer le recrutement localiste ; enfin nous expliquerons pourquoi nous restons favorables à une régulation administrative.
Avec raison, BGL rappellent que nous adoptons une définition très stricte du localisme (soutenir et diriger sa thèse à la fois dans la même discipline et la même université), laquelle conduit peut-être à sous-estimer des formes de proximité et de clientélisme entre établissements très proches, en particulier ceux d’une même agglomération. Ils proposent d’adopter une approche plus large du localisme et de définir celui-ci comme le fait d’être recruté à la fois dans la même discipline et la même agglomération. Cette mesure conduirait selon BGL à réévaluer la place de Paris dans la hiérarchie du localisme. En effet, les établissements parisiens semblent en général moins fermés que les autres selon notre mesure. Mais cette ouverture relative pourrait finalement bénéficier principalement à des docteurs parisiens d’autres établissements lesquels peuvent même avoir fait leur thèse quasiment dans les mêmes murs que l’établissement qui les emploie (à la Sorbonne pour Paris 1, 3, 4, 5, à Jussieu pour Paris 6 et 7, etc.).
La remarque de BGL est recevable. Un tel traitement était d’ailleurs en projet avec différents critères géographiques (agglomération ; distance kilométrique ; temps de parcours en train). Il reste délicat à mettre en œuvre en raison des limites toujours arbitraires que l’on impose à une « agglomération » : Versailles Saint-Quentin et Marne La Vallée font-elles partie de la même agglomération ? Y a-t-il plus de proximité entre les docteurs et les jurys de l’une et de l’autre université qu’entre ceux de Grenoble et de Lyon ?
Regardons ainsi, toujours à partir de la base des thèses soutenues, le « recrutement » dans l’agglomération parisienne en fonction de trois niveaux de proximité : locaux d’Île-de-France, autres candidats d’Île-de-France et candidats de province (tableau 1).
Tableau 1. Recrutement dans les établissements d’Île-de-France (1972-1996).
Types de candidatures | Nombre de candidatures | Nombre de recrutés | Taux de réussite |
---|
1. Locaux Parisiens | 36102 | 1473 | 4,08% |
2. Extérieurs Parisiens | 137737 | 1027 | 0,75% |
3. Provinciaux | 199062 | 323 | 0,16% |
1+2. Parisiens ensemble | 173839 | 2500 | 1,44% |
2+3. Extérieurs ensemble | 336799 | 1350 | 0,40% |
Ensemble | 372901 | 2823 | 0,76% |
Note de lecture : On compte dans notre traitement 36 102 candidatures de locaux parisiens, dont 1 473 ont été recrutées, soit un taux de réussite de 4,08%. Sources : DOCTHESE.
Les candidats locaux ont des chances plus importantes que les candidats extérieurs parisiens, lesquels ont des chances plus importantes que les candidats provinciaux. La part des provinciaux recrutés est particulièrement faible : 11,44%. Les candidats provinciaux forment pourtant 53% des candidatures.
Résultat plus surprenant, que nous ne prévoyions guère, le différentiel de succès entre les locaux parisiens et l’ensemble des extérieurs (4,08% versus 0,40%) est du même ordre que le différentiel de chance entre l’ensemble des candidatures parisiennes et les candidatures provinciales (1,44% versus 0,16%). Le Mantel-Haenszel Odds-Ratio est de 7,49 dans le premier cas et de 7,37 dans le second cas.
Le même traitement ne conduit pas à modifier substantiellement les résultats pour les autres agglomérations. En province, dans une même agglomération, la division des universités suit plus souvent une logique de spécialisation disciplinaire et les résultats ont encore moins de chance de varier [1].
Le traitement intéressant que suggèrent BGL ne modifie donc guère notre constat d’un localisme relativement moindre des universités parisiennes.
Une des difficultés pour évaluer la nocivité du localisme tient au fait que nous ne disposons d’aucun indicateur de la qualité des candidats. Nous ne pouvons donc démontrer empiriquement que le localisme conduit à recruter des candidats moins bons. Nous pouvons juste considérer que ce phénomène est probable. Nous allons essayer de préciser pourquoi.
BGL nous prêtent une conception très pessimiste du recrutement local selon laquelle les candidats locaux sont en moyenne moins bons que les candidats extérieurs, à savoir Cloc < Cext. En toute généralité, cette proposition est problématique. Comment les candidats pourraient-ils être toujours moins bons à domicile et meilleurs à l’extérieur, alors même qu’ils candidatent à la fois comme candidats extérieurs et comme candidats locaux ?
La conception implicite utilisée dans l’article est légèrement différente : on considère que plus l’on s’écarte de la situation d’indépendance (une part de locaux recrutés égale à la part des locaux parmi les candidats), plus les chances de rater les meilleurs candidats augmentent. Au niveau d’un établissement, lorsque les candidats extérieurs et locaux sont du même niveau, les risques « d’erreur » de recrutement augmentent à la fois en fonction du biais localiste et en fonction du biais inverse antilocaliste (ne recruter systématiquement que des extérieurs). C’est pourquoi, en l’absence d’information sur la qualité, nous mesurons le localisme comme un écart à la situation d’indépendance.
Par ailleurs, en conclusion, nous cherchons à introduire la question de la qualité en proposant deux hypothèses extrêmes. Première hypothèse, les universités, dont les docteurs sont de qualité moyenne équivalente, recrutent collectivement les meilleurs candidats : le localisme constaté refléterait alors la préférence des candidats pour des postes locaux. Deuxième hypothèse, l’univers académique est strictement hiérarchisé : C11> …> C1n1>C21> … >C2n2> …Cji > Ckn1>... >Cknk, où Cji représente la valeur du candidat i de l’université j. Dans ce cas-là, dans une université de rang j si tous les candidats d’université j-1 n’ont pas été recrutés dans les universités de rang j-1 alors un recrutement local renvoie au fait qu’un candidat local recruté est moins bon que le meilleur extérieur refusé. Dans la meilleure université, le recrutement local est justifié ; dans les universités suivantes, sauf pénurie de candidats, il est injustifié.
Les questions soulevées par BGL sur la qualité des candidats locaux et extérieurs, d’une part, et sur l’importance de la préférence des candidats eux-mêmes pour le recrutement local, d’autre part, nous invitent à préciser la relation entre recrutement local et qualité dans différents cas de figure.
1. Recrutement local en l’absence de hiérarchie des universités, de préférence locale des candidats et des universitaires.
Supposons que la distribution de la qualité des docteurs suit une même variable aléatoire continue [2]. Sous cette hypothèse, la forme de la variable aléatoire ne dépend pas de l’établissement : la moyenne et l’écart-type de la qualité sont les mêmes. On peut ordonner l’ensemble des docteurs en fonction de leur qualité q1>q2… >qN .
Pour penser l’absence de préférence des candidats pour un établissement donné, imaginons un recrutement séquentiel de j personnes dans k universités, selon un ordre aléatoire : l’université 1 recrute le premier jour, puis l’université 2 le deuxième jour… jusqu’à l’université k le kième jour (ce qui correspond plus ou moins au calendrier des auditions). Ajoutons en outre la contrainte suivante : il n’y a aucun désistement possible ni de liste d’attente.
Supposons que l’on recrute toujours les meilleurs candidats. La probabilité de trouver Xj locaux parmi les lj recrutés dans l’établissement j suit une loi hypergéométrique.
L’espérance du nombre de locaux recrutés dans l’établissement j lorsque l’on recrute lj personnes s’écrit alors.
On retombe sur notre cas implicite d’indépendance signalé au-dessus : la proportion de recrutés locaux lorsque l’on recrute systématiquement les meilleurs candidats est égale à la proportion de locaux parmi les candidats.
Au niveau de la discipline, l’espérance s’écrit alors ainsi :
C’est le point de comparaison que nous avons privilégié avec l’Odds Ratio. Un écart peut venir soit du localisme des universités, soit des candidats recrutés qui par le jeu des désistements s’apparieraient avec leur université de provenance, soit d’une combinaison des deux. Nous ne connaissons ni la part de ces deux formes ni le préjudice global qui découlerait d’un localisme des universités. Explorons plus avant ce dernier point.
2. Recrutement local maximal sans préjudice global.
Donnons la possibilité aux candidats de manifester leur préférence sur les lieux de recrutement par un système de désistement et de liste d’attente. Supposons ainsi que les candidats préfèrent toujours être recrutés localement qu’à l’extérieur et qu’ils puissent s’échanger parfaitement les postes dans le classement jusqu’à ce que le nombre de recrutements locaux soit maximum [3]. Quelle serait la proportion de candidats recrutés locaux ? Cette proportion représente aussi un niveau de localisme subtil qui pourrait être pratiqué par les universitaires sans dégrader la qualité du recrutement au niveau agrégé : on ne préfère le candidat local que s’il fait partie des k meilleurs qui doivent être recrutés l’année en question.
Dans un établissement, la probabilité d’avoir au moins un local parmi les k meilleurs candidats s’exprime ainsi :
Cette probabilité peut être assez élevée.
Par exemple, imaginons une université où se présentent 5 candidats locaux, 195 candidats extérieurs. On sait que lors de cette année-là, 10 postes sont offerts dans la discipline. Si la probabilité que le candidat local soit le meilleur candidat est assez faible (2,5%), en revanche la probabilité qu’un des cinq locaux fasse partie des cinq meilleurs est beaucoup plus élevée : 23%.
L’espérance du nombre de locaux parmi les k recrutés sachant que lj postes sont ouverts au recrutement dans l’établissement j s’écrit ainsi :
Et l’espérance de localisme au niveau de la discipline est alors :
Cette espérance du nombre de candidats locaux qui repose sur des hypothèses hautement héroïques et improbables (égalité des universités, préférence locale systématique chez les candidats, permutation optimale des postes) représente l’hypothèse la plus favorable pour rendre compte de nos niveaux de localisme. Sous les hypothèses d’égalité des universités, pour obtenir un nombre de locaux supérieurs par discipline à la somme de ces espérances, il faut que l’on ait recruté dans la discipline des locaux qui ne font pas partie des k meilleurs (et donc écarter certains des k meilleurs).
Il n’est pas inutile de mesurer le recrutement local que l’on pourrait atteindre sous cette hypothèse la plus favorable. Appliquons donc cette espérance à nos données. Sous ces hypothèses, pour autant qu’on les adopte, on peut arriver à un niveau de recrutement local presque aussi important que celui constaté. 4403 recrutements locaux sont attendus contre 4549 constatés. La différence d’ensemble est donc faible, de l’ordre de 1,8% des recrutements.
Toutefois derrière cette bonne adaptation d’ensemble de ces hypothèses héroïques aux données agrégées se trouvent des sous-ensembles conséquents pour lesquels elles fonctionnent moins. Dans certaines disciplines, on trouve moins de locaux qu’attendus, et dans d’autres davantage. Dans le premier cas, on peut très bien imaginer que cela tient au non respect de la préférence systématique des candidats pour un recrutement local. En revanche, compter par discipline plus de locaux recrutés que de locaux attendus sous les hypothèses les plus favorables provient (sous l’hypothèse d’égalité des universités) du fait que des candidats locaux recrutés ne font pas toujours partie des meilleurs candidats (voir tableau 2). L’espérance la plus favorable est dépassée dans 19 disciplines et l’écart cumulé s’élève à 595 personnes, soit 15% des recrutements de ces disciplines et 7% de l’ensemble. Ceci pourrait se lire de la façon suivante : le recrutement local a conduit au minimum à écarter 595 candidats extérieurs qui auraient été meilleurs que les candidats locaux [4].
Tableau 2 : principales disciplines pour lesquelles on trouve plus de locaux qu’attendus même sous l’hypothèse la plus généreuse (1972-1996).
Disciplines | Nombre de locaux recrutés | Nombre de locaux recrutés attendus sous H1 | Ratio A/B |
---|
Ethnologie - Sciences des religions | 37 | 29,5 | 1,3 |
Sciences de l’ingénieur | 513 | 405,3 | 1,3 |
Informatique | 255 | 200,4 | 1,3 |
Géographie | 96 | 72,6 | 1,3 |
Droit | 191 | 140,6 | 1,4 |
Economie | 181 | 117,1 | 1,5 |
Chimie | 286 | 182,8 | 1,6 |
Gestion | 68 | 39,8 | 1,7 |
Sciences de l’éducation | 24 | 12,2 | 2 |
Sciences médicales | 87 | 42,5 | 2 |
Science politique | 32 | 10,3 | 3,1 |
Note de lecture : En Ethnologie, on attendait 29,5 locaux sous l’hypothèse la plus favorable. Dans nos données en compte 37. Sources : DOCTHESE.
3. Introduction des différentiels de qualité entre les établissements
L’introduction d’un différentiel de qualité entre les établissements producteurs conduit, sous les hypothèses les plus raisonnables, à réduire l’importance du recrutement local sous l’hypothèse la plus favorable. Aussi, plus l’on pense que la hiérarchie entre les établissements est forte, plus le localisme peut signifier le recrutement de candidatures qui ne font pas partie des k meilleures.
Donnons l’intuition avec la petite modélisation suivante de la différence de qualité entre établissements. On considère que les doctorants sont comme des boules qui tombent dans plusieurs sacs avec différentes probabilités indépendantes pji (avec Σj pji=1) [5]. Cette probabilité pji peut être réécrite comme une combinaison de la sélectivité aji et de l’attractivité globale pj : pji = aji + pj avec Σi aji=0 et pj=Σi pji/N. Une université sera d’un rang d’autant plus élevé qu’elle sélectionne les meilleurs docteurs, c’est-à-dire que aji est élevé pour un i de rang supérieur.
On recrute un docteur dans chacune des k universités de telle sorte que les k meilleurs soient recrutés.
Deux cas sont de nouveau envisagés :
a) Les candidats n’ont pas de préférence pour un établissement donné, l’ordre de recrutement suit un ordre aléatoire équiprobable et il n’y a pas de possibilité de permuter.
Dans le cas d’un établissement donné, l’espérance de recrutement local peut s’écarter fortement de l’hypothèse d’indépendance (égale ici à pj). L’espérance de recrutement local est d’autant plus importante que l’établissement sélectionne les k meilleurs.
En revanche, lorsque l’on calcule l’espérance au niveau de la discipline, on retombe ici sur la situation d’indépendance qui vaut 1.
Ceci justifie à nouveau de mesurer, au niveau de la discipline et non plus au niveau de l’université, le biais localiste comme un écart à l’indépendance.
b) Localisme maximal sans préjudice global : les candidats sont localistes et peuvent échanger sans difficultés leur poste et/ou les universités sont localistes dans la limite où le recrutement local se fait en faveur d’un des k meilleurs.
Cette espérance atteint un minimum lorsque les k meilleurs candidats sortent tous de la première université et un maximum k (100% de locaux) lorsque ces k meilleurs sont répartis dans les k universités. On peut donc générer tout type de résultat. Toutefois, en rajoutant des contraintes supplémentaires relativement réalistes de croissance de notre paramètre de sélectivité aji pour les k premiers docteurs
, nos simulations montrent que, dans de nombreux cas, la situation de non hiérarchisation aji=0 conduit à maximiser cette espérance de localisme [6]. Certes, dans d’autres cas, on peut trouver des distributions des aji qui produisent une espérance supérieure [7]. Mais celle-ci est généralement peu différente du cas de non hiérarchisation. Et passé ce seuil, l’espérance diminue ensuite avec la croissance des paramètres de sélectivité aji.
Sous des hypothèses relativement générales, l’introduction d’une hiérarchisation des universités fait donc baisser (au moins au-delà d’un certain seuil) l’espérance du nombre maximum de recrutements locaux sans erreurs de recrutement, c’est-à-dire sans écarter aucun des k meilleurs. Les erreurs de recrutement du fait du localisme évaluées à 595 ont donc de grandes chances d’être supérieures. Nous ne pouvons toutefois les quantifier exactement. Mais notre proposition selon laquelle que le risque d’écarter un bon candidat croît avec le localisme semble relativement étayée.
Il n’en reste pas moins, comme l’expliquent BGL, qu’on peut avoir de bonnes raisons d’écarter des candidats extérieurs. Ils proposent une explication fonctionnelle du recrutement préférentiel des docteurs locaux en termes de gestion de l’incertitude. Ils reprennent avec plus de précision un des éléments que nous avions avancés : les commissions de spécialistes connaissent mieux les docteurs locaux. Ils disposent, pour les avoir côtoyés pendant plusieurs années, d’un ensemble d’informations plus important que pour les docteurs extérieurs. Ils estiment plus précisément leur qualité et le risque d’erreur d’appréciation est donc plus faible. Précisons un point : comme il n’y a pas de raison de penser que le risque d’erreur d’estimation de la qualité soit asymétrique, l’argument sur le risque du recrutement est intrinsèquement lié à une forme d’aversion au risque.
BGL mobilisent un certain nombre de travaux pour montrer que la mobilisation des réseaux dans la vie économique peut servir à faire circuler de l’information, à réduire l’incertitude et à améliorer les appariements. Cet effet est indéniable, mais doit être nuancé. Si les réseaux servent souvent dans le secteur privé à informer des recrues potentielles de postes disponibles ou les entreprises de candidats possibles, dans le monde académique français, le caractère partiellement centralisé de la procédure (publication très attendue au Journal Officiel des postes disponibles) nuance un peu cette dimension. De quelles informations plus précises dispose-t-on sur les candidats locaux ? On dispose d’informations plus complètes sur les travaux du candidat et sa capacité à les exposer lors des séminaires dans la mesure où l’on a suivi et encadré sa progression. On connaît sa capacité à collaborer, à être un collègue sympathique. Certes, on connaît mieux ses capacités pédagogiques, mais ce dernier élément, souvent avancé, ne doit pas être exagéré : il est rare que les enseignants assistent aux cours les uns des autres. Les évaluations des enseignements, quand elles sont faites, ne circulent généralement pas et les plans de cours pas toujours. Les informations viennent plutôt des réunions pédagogiques de concertation, des rumeurs colportées par les étudiants et des conversations informelles.
Les relations permettent certes d’acquérir de l’information mais c’est avoir une conception restrictive des relations sociales que de les réduire à la seule dimension informationnelle. Elles sont aussi une affaire de dons/contre-dons, d’obligations mutuelles, de loyauté, d’affinités, de sympathie au sens étymologique ou pour le dire à la manière des économistes, d’altruisme : une utilité dépendante de l’utilité d’un autrui particulier. Enfin, la dimension informationnelle des relations sociales explique mal les variations considérables de localisme que l’on constate par discipline ou plus encore par université. Il n’y a pas de raison évidente de considérer que les universitaires de telle ou telle université soient plus averses au risque que ceux de tel autre, ou que leur risque d’erreur soit plus grand. Pour le faire, il faudrait, dans le cadre du raisonnement de BGL, invoquer des raisons en termes d’isolement relationnel, en partie géographique, mais aussi en partie endogène, qui révèleraient une moindre qualité et globalement un gain plus important encore à un recrutement extérieur.
Examinons les principaux objectifs dont tiennent compte les recruteurs, lors d’un recrutement.
a) la qualité des docteurs
Cette qualité pourrait être représentée comme l’appréciation moyenne des qualités d’un docteur par la communauté académique.
b) le risque d’erreur sur l’appréciation de cette qualité pondérée par l’aversion au risque
Ce point a été bien mis en évidence par BGL.
On pourrait mettre dans la même rubrique, le biais d’évaluation de la qualité. Si un docteur étudie un sujet donné, il y a de fortes chances que l’université de production trouve ce sujet intéressant.
c) la rentabilisation des investissements spécifiques
Certains candidats, en particulier les candidats locaux, sont plus à même de valoriser certains investissements du département qui recrute. Ce peut être des investissements pédagogiques (cours déjà prêts), une école de pensée naissante, un champ scientifique émergeant, des équipements matériels (laboratoires), des relations de partenariat avec des entreprises, etc.
d) le risque de défection du candidat
Le risque de défection se pose à la fois à très court terme et à moyen terme.
À court terme, classer uniquement des excellents candidats qui risquent de partir ailleurs est une stratégie risquée. Le risque d’épuiser le classement (limité à 5 fois le nombre de postes à pourvoir) n’est pas nul, ce qui ferait perdre un an et obligerait à recommencer le recrutement (si celui-ci est renouvelé). Aux États-unis, selon Christine Musselin [8], évaluer la position relative de l’université par rapport aux plus grandes et éviter de viser trop haut lors des auditions est un moyen de régler le problème. En France, classer un local limite ce risque d’invalidation du recrutement.
À moyen terme, recruter un candidat extérieur, c’est prendre le risque que le candidat fasse défection rapidement (dès la fin de son exeat) pour avoir un poste ailleurs. Là aussi, classer un candidat local, moins enclin à faire défection, limite ce risque.
Dans les deux cas, le risque de défection est d’autant plus grand que l’on estimera que les candidats sont eux aussi localistes et qu’ils veulent retourner chez eux.
Le phénomène des « turbos » qui ne déménagent pas dans la ville où ils sont recrutés et dont les locaux disent qu’ils sont moins présents (ce que de nombreux turbos contestent) pourrait être considéré comme une forme de défection partielle.
e) l’effet signal et réputationnel du recrutement
Recruter tel ou tel candidat peut être bien ou mal vu. Il peut envoyer des signaux qui encouragent certaines populations à espérer un poste, à devenir docteur dans la faculté et à candidater.
f) les relations de sympathie pour le candidat
À ces principaux points concernant les objectifs du recruteur s’ajoutent les préférences des candidats pour être recrutés dans telle ou telle université. On pourra donc dire que le localisme finalement constaté dans un département donné est une fonction croissante de la préférence des candidats pour le local, de la qualité relative des docteurs locaux, du risque d’erreur sur la qualité des extérieurs, de l’aversion au risque, de l’importance des investissements spécifiques aux docteurs locaux, de la probabilité de défection des extérieurs, de la nécessité d’inciter les docteurs locaux, de l’opacité du recrutement et de la sympathie pour les docteurs locaux. On pourra discuter de la légitimité des différents critères au regard des objectifs et des idéaux du système académique.
Nos données très pauvres ne nous permettent généralement pas d’estimer le poids des différents facteurs. Il est un facteur dont on peut estimer peut-être l’ampleur, c’est le dernier. Il suffit de trouver une variable affectant négativement le bien-être des docteurs et de montrer que cette variable a une incidence sur l’importance du localisme. Ceci prouverait que les recruteurs cherchent aussi à maximiser le bien-être des docteurs issus de leur université. Regardons ainsi la relation entre l’importance du localisme dans les différentes université et la capacité des établissements à exporter des docteurs dans d’autres universités (Graphique 1).
Graphique 1 : Variation du localisme des universités en fonction de leur capacité à exporter leurs propres docteurs (1972-1996)
Cliquer ici pour agrandir le graphique
Note de lecture : Les docteurs de Paris 5 s’exportent 2,06 fois plus que les docteurs des autres universités. Ils ont 4,76 fois plus de chance que les extérieurs d’être recrutés à Paris 5. La taille des points varie en fonction du nombre de personnes recrutées lors des épisodes de compétition locaux extérieurs. Le rapport entre le taux d’exportation d’une université et celui de ses concurrents est fondé comme pour le localisme sur le Mantel Haenszel Odds Ratio [9]. La droite d’ajustement est estimée par une régression log-linéaire pondérée par le nombre de personnes recrutées : ln(ORloc)=4,50-1,15*ORExport . Les paramètres sont très significatifs (au seuil de 1/10000). Le R2 est de 18%. Sources : DOCTHESE.
Le graphique 1 montre que le localisme est fortement corrélé à une faible capacité à exporter. Le R2 s’élève à 18%. Le sens de cette corrélation peut être interprétée de plusieurs façons [10]. Nous proposons l’interprétation suivante. Les directeurs de thèse se soucient du bien-être de leurs docteurs. Plus ceux-ci éprouvent des difficultés à s’insérer sur le marché du travail académique, plus leurs directeurs de thèse vont faire leur possible pour les aider, notamment en les recrutant localement. Cette sensibilité louable au destin de ses docteurs peut se faire au détriment de la qualité d’ensemble du recrutement.
BGL ont raison de conseiller la prudence par rapport à une étude qui ne cache pas son caractère approximatif. D’autres études sur des données plus précises, notamment à partir de la base de données ANTARES, permettraient de faire des estimations plus justes des tendances récentes, du rôle de la contre-mobilité et, à partir des classements, de la part respective de la préférence locale des universités et des candidats… Ceci n’empêche pas dès à présent de réfléchir aux modes de régulation les plus adaptés si l’étude était confirmée dans ses conclusions.
BGL préconisent d’améliorer le dispositif de transparence et de collecte des informations. Nous sommes d’accord avec eux ! Ce type de mesure ne peut qu’améliorer le processus d’appariement. Mais le point sur lequel nous divergeons est le suivant : la question du recrutement et du localisme est pour eux essentiellement un problème informationnel. D’après nous, les relations académiques, comme n’importe quelles relations sociales, ne sont pas qu’un véhicule de transmission de l’information. Elles constituent aussi des relations de loyauté, de dons-contre-dons, de sympathie, de solidarité. Qu’un directeur de thèse soutienne son docteur, entretienne des relations amicales avec lui, le pousse à publier, l’aide à trouver un poste, se soucie de son avenir académique est une très bonne chose pourvu que la réalisation de ces objectifs ne soit pas entièrement à sa discrétion. Si l’on pense que cette dimension de solidarité est importante, on peut reposer la question de la relation entre la collecte d’information et le localisme. Est-ce, comme le soutiennent BGL, parce que le dispositif d’information est insuffisant que l’on recourt aux relations locales ? Ou est-ce parce que l’on peut (et veut) se reposer sur les relations locales que l’on n’a pas besoin de recourir à une information de meilleure qualité ? La corrélation aux États-unis entre l’interdiction de fait du localisme et l’intensité du processus de collecte d’information (le job market) peut ainsi indiquer que le second phénomène découle du premier.
C’est pourquoi nous restons favorables à ce que les pouvoirs publics envisagent la régulation du recrutement local (ce qui ne les empêche pas d’effectuer des études plus robustes que la nôtre avant de prendre une décision). Plusieurs pistes de régulation, non exclusives, peuvent être envisagées.
Des mesures générales sur les concours :
Des politiques qui portent spécifiquement sur la question du localisme.
Ces différentes mesures doivent être envisagées à la fois sous l’angle des objectifs du recrutement, en limitant les recrutements discutables d’une part, en permettant les appariements bénéfiques d’un point de vue académique des universités et des candidats d’autre part, ainsi que sous l’angle de la faisabilité et des coûts de mise en œuvre.
L’intérêt des mesures générales est d’améliorer le recrutement dans son ensemble et de limiter, si les procédures sont bonnes, toutes les erreurs de recrutement, toutes les formes de clientélisme. Au contraire, cibler le recrutement local s’impose dès lors que l’on pense qu’il s’agit d’une forme de biais massif et que ce biais doit beaucoup à des relations personnelles de loyauté. Même si on peut toujours imaginer les effets pervers de la réduction ou de la suppression du localisme (comme la mobilisation d’autres formes de réseau et de loyauté), il est fort probable que ces relations produisent des effets qui soient bien moindres que dans le cas local. Lors d’un recrutement local, les effets de loyauté sont redoublés par leur caractère partagé. De nombreux membres connaissent et apprécient personnellement le candidat local. Lorsqu’il s’agit d’un candidat extérieur, la convergence des éventuelles loyautés sera moins probable. La transitivité des relations de loyauté (avoir un ami à l’extérieur lequel soutient chaleureusement son docteur et vous encourage vivement à le recruter) existe toujours mais l’effet global est nettement diminué par rapport à un effet direct [11].
a) Accroître la transparence et améliorer les procédures actuelles
Centraliser l’information comme le font les mathématiciens sur le processus de recrutement ne peut qu’améliorer les choses [12]. Réviser le calendrier de recrutement, organiser des auditions plus longues, rembourser les frais de déplacement des candidats, doter d’un véritable budget ces concours qui paradoxalement font partie des moins coûteux de la fonction publique ne peut qu’améliorer les choses. Deux limites : on ne sait pas si ces mesures seront suffisantes ; l’obtention des budgets pour améliorer la qualité de la procédure de recrutement est difficile dans un contexte de pénurie budgétaire.
b) L’organisation d’un concours national
Cette solution similaire au concours de l’agrégation du supérieur ou au concours du CNRS peut être intéressante pour établir un ordre des k « meilleurs » candidats (au sens du jury) au niveau d’une discipline. Elle rencontre deux limites. D’une part, le jury peut être biaisé en faveur des candidats qu’il connaît, comme le montre des travaux sur l’agrégation du supérieur en économie [13]. D’autre part, comme le remarquent BGL, le système est contraignant en ne permettant pas aux universités de choisir les candidats les plus adaptés à leurs besoins.
c) Un CNU plus restrictif
En qualifiant chaque année plus de la moitié des candidats – et ce pour quatre ans –, le CNU autorise à participer à la phase locale cinq fois plus de nouveaux candidats maîtres de conférences qu’il n’y a de postes. On pourrait imposer au CNU de qualifier de manière beaucoup plus restrictive en fonction du nombre de postes ouverts. La limite de ce type de mesure tient d’une part au risque de partialité de chaque membre du CNU par rapport à ses anciens docteurs ou collègues, d’autre part à la sous-dotation actuelle du CNU en effectif matériel et humain par rapport à l’ampleur de la tâche que constituerait une sélection plus restrictive.
d) Une politique d’incitation
En mathématiques depuis quelques années, les laboratoires pratiquant l’autorecrutement sont, dit-on, sanctionnés lors des évaluations par le CNRS, alors que ceux qui pratiquent le recrutement à l’extérieur sont encouragés. Cette politique aurait contribué à faire augmenter sensiblement la mobilité [14]. Plus généralement, une politique d’incitations financières auprès des universités et des candidats (à commencer par une prise en charge du déménagement des nouvelles recrues) permettrait ainsi d’inciter à plus de mobilité. La politique incitative est sans doute la plus souple puisqu’elle n’interdit pas un appariement local qui serait particulièrement bénéfique tout en limitant les autres. La principale limite, dans le contexte actuel, tient au fait que pour produire des effets importants, il faut avoir des budgets importants.
e) Un système de quota
Dans l’idéal, selon notre démonstration, il faudrait limiter le recrutement local de telle sorte qu’au niveau agrégé (disciplinaire) les taux de réussite des locaux et des extérieurs soient équivalents. Comment atteindre un tel idéal ? La chose est complexe à organiser. Faut-il autoriser les universités à recruter localement, par exemple une fois sur douze ? Faut-il faire autoriser (de préférence a priori plutôt qu’a posteriori) par une instance extérieure ceux des recrutements qui, dans une discipline, sont ouverts aux candidats locaux (et laquelle – CNU, AERES, ministère…) ? Un tel système est complexe à régler et à réguler.
f) L’interdiction du recrutement local pendant une durée limitée
L’inconvénient principal de ce type de mesure est d’empêcher autoritairement des appariements locaux bénéfiques. En même temps, c’est une méthode qui conserve plus de souplesse que le concours national. Les universités conservent la possibilité de trouver des bons candidats dans l’espace des candidatures en provenance des autres universités de France, et plus encore de l’étranger, ce qu’on oublie trop souvent. En outre, la limitation dans le temps de l’interdiction permet à ces appariements d’être malgré tout réalisés avec un petit retard. La mise en œuvre, sous réserve que cette discrimination légale soit approuvée juridiquement, est simple et très peu coûteuse. Une surveillance lors de l’instauration permettrait de voir si le système est robuste ou s’il crée des rigidités et oblige à quelques dérogations [15].
La raison pour laquelle nous sommes favorables à cette dernière mesure est la suivante : elle n’est pas parfaite, elle a des inconvénients, mais, dans un système dont on dit qu’il est difficile à réformer, elle présente un rapport coût-bénéfice particulièrement intéressant.
Cet article est une réponse au texte d’Olivier Bouba-Olga, Anne Lavigne et Michel Grossetti, publié par La Vie des idées le 12 mai 2008 :
– Le localisme dans le monde académique : une autre approche
Le texte d’Olivier Bouba-Olga, Anne Lavigne et Michel Grossetti était une réponse à l’enquête d’Olivier Godechot et Alexandra Louvet :
– Le localisme dans le monde académique : un essai d’évaluation
par & , le 13 mai 2008
Olivier Godechot & Alexandra Louvet, « Le localisme universitaire : pour une régulation administrative. Réponses à Olivier Bouba-Olga, Michel Grossetti et Anne Lavigne », La Vie des idées , 13 mai 2008. ISSN : 2105-3030. URL : https://laviedesidees.fr./Le-localisme-universitaire-pour
Si vous souhaitez critiquer ou développer cet article, vous êtes invité à proposer un texte au comité de rédaction (redaction chez laviedesidees.fr). Nous vous répondrons dans les meilleurs délais.
[1] A Lyon, on tombe sur une échelle assez similaire à celle de Paris : taux de réussite des locaux lyonnais, 7,2%, des extérieurs lyonnais 1,2%, et des non lyonnais 0,2%. Mais la part des extérieurs lyonnais est relativement faible (2 602 candidatures, pour 3 772 candidatures locales, et 93 928 non lyonnaises). Ici, notre odds-ratio baisse un peu lorsque l’on passe du localisme d’établissement à celui d’agglomération, passant ainsi de 38 à 32.
[2] Dans ce qui suit, nous considérons pour faciliter le raisonnement qu’il existe une hiérarchie extérieure de la qualité. Ceci n’a rien d’évident. En réalité, si on peut imaginer que chaque universitaire puisse établir sa hiérarchie ordinale des candidats (qui dépendra notamment de ses propres centres d’intérêt académique), en général l’agrégation de ces ordres de préférence individuels n’a aucune raison de générer un ordre transitif s’il n’existe pas une norme de cardinalisation.
[3] Notons que même en supposant une préférence locale systématique, un classement identique dans chaque université, il existe de nombreuses configuration dans lesquelles les k meilleurs ne peuvent pas se réaliser cet appariement optimal.
[4] Idéalement, il faudrait pouvoir calculer un intervalle de confiance, ce qui serait ici fort complexe : la loi des grands nombres ne s’applique pas.
[5] Ici, on ne raisonne pas à effectif par établissement fixé. L’espérance du nombre de docteurs est par établissement est alors de Σi pji .
[6] Le maximum est une alors une « solution de bord » complexe à exprimer qui dépend de la structure des pj. La non-hiérarchisation (aji=0) semble bien correspondre à l’espérance maximale de localisme lorsque les universités produisent toutes autant de docteurs ou lorsque le nombre de docteurs augmente avec le rang de l’université.
[7] Ainsi lorsque ce sont les universités de rang inférieur qui produisent le plus de docteurs, le maximum de cette espérance de localisme peut être sensiblement supérieur à l’hypothèse de non-hiérarchisation.
[8] Cf. Christine Musselin, Le marché des universitaires. France-Allemagne-Etats-Unis, Presses de Sciences-po, 2005.
[9] L’unité de base de ce calcul est, comme pour le localisme, le département disciplinaire dans une université, une année donnée.
[10] On peut considérer que aussi le localisme entraîne à moyen terme des difficultés à l’exportation. En outre, la relation directe entre ces deux variables n’est pas exempte de problèmes d’endogénéité difficiles à démêler : le localisme des uns dépend de la capacité à exporter qui dépend du localisme des autres.
[11] Un travail en cours sur la même base de données tend à montrer que l’effet du réseau plus lointain (mesuré par les mobilités récentes des directeurs de thèse d’un département à l’autre) sur le recrutement existe mais qu’il est d’une moindre amplitude.
[13] Cf. Philippes Combes, Laurent Linnemer, Michael Visser, « Publish or Peer-rich ? The Role of Skills and Networks in Hiring Economics Professors », Labour Economics, à paraître.
[15] On pense notamment aux universités très éloignées (Université de Polynésie Française ; Université des Antilles et de la Guyane) ou aux sous-disciplines très spécialisées où l’on trouve qu’un seul établissement producteur de docteurs (études coréennes).