Si l’art est incapable d’arrêter la guerre, il rend possible des formes de résistance symbolique et institutionnelle, explique Marion Slitine, commissaire associée de l’exposition Palestine à l’IMA et spécialiste de la création contemporaine palestinienne.
Marion Slitine est anthropologue, chercheuse à l’EHESS et au MUCEM à Marseille et enseignante à Sciences Po Paris. Auteure d’une thèse intitulée « La Palestine à travers les créations. La fabrication de l’art contemporain palestinien, des territoires colonisés aux scènes mondialisées » (mentions spéciales du Prix de thèse du Musée du quai Branly et du GIS Moyen-Orient en 2020), elle s’intéresse aux interactions entre art, politique et espace public dans le monde arabe contemporain, en particulier en Palestine et au Maroc. Parallèlement, elle est actuellement commissaire associée de l’exposition « Ce que la Palestine apporte au monde » à l’Institut du monde arabe à Paris et membre de plusieurs projets artistiques, dont le Musée des nuages Sahab du collectif Hawaf.
La Vie des idées : L’exposition « Ce que la Palestine apporte au monde » a ouvert le 31 mai 2023. Quels changements avez-vous pu observer depuis les événements d’octobre depuis votre point de vue de commissaire associée ?
Marion Slitine : Si l’exposition a été conçue bien avant la guerre, elle a pris une tout autre dimension depuis la situation catastrophique d’octobre que les observateurs de l’ONU décrivent aujourd’hui comme un « enfer sur Terre ». Depuis le commencement de la guerre la plus brutale sur Gaza, on a vu en France une chape de plomb s’abattre, qui a contraint au silence les milieux académiques [1], culturels [2], médiatiques. Ce resserrement de l’espace en France à toute forme d’expression de soutien aux droits des Palestiniens allait de pair avec un besoin croissant de l’opinion publique de trouver des espaces pour comprendre et échanger sur la question palestinienne.
Même si l’art n’arrêtera pas les massacres, l’exposition « Ce que la Palestine apporte au monde » a permis d’ouvrir un espace de dialogue, de réflexion, sur l’importance de la question palestinienne dans et pour le monde. Elle a connu un regain d’intérêt, de la part des médias et du public, une fréquentation jamais égalée et un public de plus en plus diversifié. Beaucoup de jeunes, de citoyens qui ne sont pas nécessairement intéressés par la Palestine se rendent chaque jour à l’exposition, en quête d’un espace pour réfléchir, tenter de comprendre, à distance de l’actualité brulante et de la saturation des images d’horreur.
L’exposition tente de déplacer le regard sur des images médiatiques qui ont tendance à représenter les Palestiniens selon le seul prisme de l’urgence, de la violence et du « conflit ». Elle tente de donner une voix à des artistes qui vivent au quotidien le poids d’une des dernières situations coloniales dans le monde. À travers le regard de ces créateurs et ces créatrices, cette exposition ouvre un espace de rencontre, d’écoute, de dialogue pour (ré)humaniser une société meurtrie et pour parler de la Palestine autrement, à l’heure où une armée occupante tente d’effacer un territoire, un peuple, une histoire.
La Vie des idées : Une partie de l’exposition s’intitule « Les Palestiniennes et les Palestiniens en leurs musées ». Quels sont ces musées ? Comment concilier l’ambition muséale de constituer des collections pérennes, et la réalité d’un territoire constamment menacé par le conflit ?
Marion Slitine : En général, les musées contribuent à la construction nationale d’un État. Dans la situation coloniale de la Palestine où la construction étatique est mise à mal, construire un musée relève du défi. L’exposition « Les Palestiniennes et les Palestiniens en leurs musées » aborde les différentes manières de « faire musée » pour, en et de la Palestine. Comment construire des collections et un musée national dans un contexte d’absence étatique ? Cette exposition tente de répondre à ces questions à travers trois collections – deux physiques et une virtuelle – qui sont mises en dialogue et repensent le musée et la solidarité. D’abord, le Musée national d’art moderne et contemporain de la Palestine (MNAMCP) fondé en 2016 par l’historien et ancien ambassadeur de la Palestine à l’Unesco Elias Sanbar avec la complicité de l’artiste Ernest Pignon-Ernest, bâtit une collection solidaire composée de dons d’artistes de partout dans le monde. Il leur a été demandé de choisir parmi leurs travaux celui qu’ils souhaitaient donner à voir au public palestinien. Aujourd’hui hébergée à l’Institut du monde arabe, cette collection se déploiera à terme dans un musée qui a vocation à être construit Jérusalem-est, considérée comme la capitale pour les Palestiniens.
Ensuite, nous présentons la collection du musée de l’Institut du monde arabe qui a beaucoup œuvré pour acquérir des œuvres de plasticiens palestiniens et du monde arabe qui témoignent et dénoncent le sort réservé à un peuple dépossédé de sa terre depuis la Nakba (la « catastrophe ») en 1948, qui correspond à l’exil forcé d’environ 800 000 Palestiniens hors de leurs terres.
Enfin, le musée virtuel Sahab (« nuage » en arabe) à et pour Gaza est présenté au cœur de l’exposition. Il a pour vocation de présenter Gaza au monde, en brisant l’isolement d’un territoire sous embargo et en le donnant à voir sous un angle inédit : sa dimension artistique. Grâce à une expérience de réalité augmentée et à la création d’œuvres digitales donnée par des artistes de Gaza, ce musée vise à préserver le patrimoine artistique de Gaza plus que jamais menacé de disparaître. Au final, ce dialogue des collections de « musées à venir » abordent différentes formes de solidarité artistique et politique - entre la France, la Palestine et le monde - par la construction d’un patrimoine muséal, qui devient en soi, un acte d’engagement pour la Palestine. Il invite à imaginer un avenir désirable.
La Vie des idées : Pouvez-vous notamment nous en dire plus sur le musée Sahab, le musée des nuages ?
Marion Slitine : Le musée Sahab a été créé par le collectif Hawaf [3] (« marges » en arabe) pour protéger et rendre visible le patrimoine archéologique, historique, artistique de Gaza – cette enclave confinée et privée de musée, où le seul moyen de rêver, c’est de regarder le ciel. Dès lors, le nuage s’est avéré l’endroit le plus adéquat et le plus sûr pour construire ce musée des possibles. En 2021, quelque part dans le cloud entre Gaza et Paris, le musée Sahab – un musée nomade – est ainsi né. Musée-refuge, thérapeutique, il tente de préserver le passé de la Palestine, pour mieux affronter le présent et dessiner les contours d’un avenir meilleur. Musée « sans frontière », il entend sortir Gaza de l’isolement, grâce à l’espace numérique et à la réalité virtuelle qui présente une collection fabriquée par les artistes. Au gré d’ateliers, des œuvres matérielles et digitales sont créées par la communauté dispersée des Palestiniens qui se voit (re)cimentée, par la construction collective du musée et de ses collections. L’exposition à l’IMA présente un des résultats de ces ateliers [4]. Au cœur de Gaza, à la galerie Eltiqa, une des deux seules galeries de la ville, qui vient d’être détruite par l’armée israélienne, quinze artistes [5] ont été invités à participer à l’un des premiers workshops du Musée Sahab : L’Atelier du nuage. De février à avril 2023, ces plasticiens, streetartistes, illustrateurs, vidéastes, nés entre 1990 et 2000, se sont réunis pour réaliser la première œuvre de ce musée-en-devenir. Il en résulte une toile collective qui représente une vue panoramique du musée imaginaire, inspirée du nuage dessiné par Salman Nawati.
Les artistes ont ensuite été sollicités pour faire don d’un objet (œuvre d’art, objet mémoriel, artefact du quotidien…) au musée. Les objets proposés reflètent une histoire individuelle ou collective qui casse les hiérarchies entre arts mineurs et majeurs et forme une collection étrange, au sens littéral du terme : hors du commun, bizarre, insolite. Ces objets qui racontent tous une histoire sont scannés pour être transportés dans l’espace numérique, et devenir accessibles par la technique de la réalité augmentée. De façon interactive, le visiteur de l’exposition est invité à aller chercher, à l’aide de son smartphone les objets cachés dans la toile collective.
L’Atelier du nuage revisite d’une certaine manière le cabinet de curiosités, ancêtre des musées. Tout comme ces lieux dans lesquels on collectionnait une multitude d’objets hétéroclites, L’Atelier du nuage rappelle ce microcosme ou résumé du monde [6]. Ainsi, à l’heure de l’enfermement croissant de cette enclave sous asphyxie, il est un « abrégé de son univers » [7] artistique qui se veut sans limites. De manière générale, le musée Sahab a vocation dans le futur, à s’incarner de manière tangible sur le territoire d’une Gaza libérée. Sahab réinvente le musée : il pourrait s’apparenter au post-musée que François Vergès appelle de ses vœux qui remet en cause le modèle du musée universel. En menant un « travail d’imagination urgent » et « en réactivant des utopies émancipatrices » [8], ce musée à-venir, dans un climat général désenchanté, fait acte de résistance, afin de défier l’ordre du monde.
La Vie des idées : La présentation de l’exposition précise que « le collectif Hawaf a pour ambition de rebâtir une communauté à Gaza ». Quels sont les effets politiques de la production artistique contemporaine ? L’art est-il toujours un outil de résistance en Palestine ?
Marion Slitine : J’aimerais commencer par vous répondre en citant une phrase tirée d’un ouvrage de référence sur l’art palestinien, de Bashir Makhoul, qui écrit :
Les Palestiniens ont été réduits à une “question politique” mondiale et, quoi qu’ils soient, ils sont certainement l’un des peuples les plus politisés au monde. Il semble souvent absurde de parler d’ « art politique » avec des artistes palestiniens. Il s’agit d’un contexte où peindre un cactus [9] peut être interprété comme un traité nationaliste et où le fait d’associer une certaine combinaison de couleurs vous conduisait en prison. [10]
Quand on sait qu’entre 1967 et 1993, un décret israélien interdisait de réunir les quatre couleurs du drapeau palestinien sous peine d’emprisonnement – d’où la pastèque aux couleurs du drapeau, devenue un symbole de la résistance palestinienne – on comprend vite que le politique semble inhérent à la production artistique palestinienne.
Historiquement, la scène des arts visuels de Palestine est très liée au mouvement de résistance palestinienne. Dès 1967, dans le contexte du mouvement de résistance à l’occupation et de lutte armée sous la tutelle de l’OLP dirigée par Yasser Arafat, l’art devient un moyen privilégié de lutter et de résister à l’occupation. L’OLP soutient intensivement la création artistique (par le biais d’expositions, de bourses, de syndicats) et considère la culture comme un outil majeur de la construction nationale. À cette époque, l’engagement de ces artistes se double d’une activité politique à part entière. Les accords d’Oslo en 1993 ont reconfiguré largement le paysage culturel palestinien, avec un afflux de fonds étrangers pour participer à la construction de l’État de Palestine.
Cette nouvelle structuration du champ culturel a permis aux artistes palestiniens de bénéficier de plus en plus d’opportunités locales et internationales, mais aussi de créer un monde de la culture où la rhétorique de la résistance est progressivement remplacée par les injonctions du monde du développement. Ces nouveaux mondes de l’art ne dépendent plus du monde politique (en l’occurrence l’OLP), mais du monde du développement (international) qui s’est mis en place depuis les années 1990 en Palestine, quitte à remettre en cause la notion même de « résistance ».
Toutefois, aujourd’hui, on pourrait dire que les pratiques artistiques de Palestine, aussi plurielles qu’elles soient, reflètent une reformulation de l’expression même du politique et de la résistance. Les artistes palestiniens contemporains semblent s’éloigner d’un répertoire directement militant où l’artiste met ses compétences au service d’une cause, pour adopter un répertoire que l’on pourrait qualifier d’existentiel, des engagements perçus moins comme politiques que civiques. Il ne s’agit plus de revendications concernant directement et nécessairement le projet national, mais de revendications à des droits à une vie décente, fondée sur un minimum de droits humains fondamentaux, comme la liberté (notamment de circuler), la dignité (de vivre sans occupation coloniale) et la justice. Et si de nombreux artistes restent attachés à la signification politique de leur art, ce n’est pas dans le sens d’une politique institutionnalisée, qu’ils rejettent très souvent. Ces artistes sont très sceptiques à l’égard des politiciens et des structures politiques traditionnelles (syndicats, partis politiques). À cet égard, les artistes suivent certaines évolutions du militantisme dans le monde, avec la disqualification du vocabulaire de l’idéologie, le rejet des modes d’organisation hiérarchiques, de la verticalité du pouvoir et des structures classiques de mobilisation sociale.
La Vie des idées : La photographie occupe une part importante de l’exposition ; la salle consacrée à ce médium confronte les projections orientalistes à des vues du quotidien des Palestiniens, loin des clichés que peut véhiculer la photographie de reportage. En quoi est-il important de rendre visibles ces autres versions de la Palestine ?
Marion Slitine : L’histoire des Palestiniennes et des Palestiniens est celle de la (re)conquête d’une visibilité historique et politique, qui passe aussi par la représentation visuelle, et la photographie y joue ainsi un rôle central. L’exposition « Images de Palestine : Terre sainte ? Terre habitée ! » sonde les « possibles de l’image » dans la lutte contre l’effacement d’une terre. Prises au XIXe siècle et de nos jours, les deux ensembles présentés partagent un même medium, la photographie, et une réalité commune, la Palestine. Pourtant, tout distingue ces deux registres visuels. Le premier, nostalgique et orientaliste, véhicule l’image d’une terre mythifiée, stéréotypée, tandis que le second, livrent des images incarnées, « habitées » du territoire. Ce sont deux manières du voir, deux approches de la Palestine. Mise en dialogue, ces deux entités montrent l’évolution d’un regard. Celle de la quête des Palestiniens vers la réappropriation, par l’image, de leur propre récit.
L’exposition présente 14 photographes contemporains, hommes, femmes de plusieurs générations, travaillant pour la plupart en Palestine actuellement. Entre photographie conceptuelle et photographie documentaire, ils témoignent chacun à leur manière, de l’énergie vitale des créateurs et créatrices de Palestine, qui réinventent les manières de voir, de dire et de représenter leur terre. Cette nouvelle génération d’artistes interroge la place du corps dans l’espace public et son rôle pour défier la domination. Le premier volet réunit des artistes qui, par la collecte d’archives et l’enquête de terrain, évoquent la manière dont l’occupation façonne le quotidien et le paysage des Palestiniens (Hazem Harb, Read Bawayeh, Taysir Batniji, Safaa Khatib). Mais aussi leurs corps, rendus « indésirables » selon les mots de Michel Agier –déracinés, empêchés, effacés – que des gouvernements se donnent le droit de marginaliser et de « laisser mourir » [11].
Ces images où les corps sont quasi absents se démarquent de celles du deuxième volet, où c’est par l’irruption du corps que les photographes revendiquent leur place dans le monde : leur droit à créer, à s’exprimer, à circuler, mais aussi le droit à la ville, au loisir, au rêve. Ponctuant le parcours, des utopies artistiques dessinent les contours d’un futur désirable : un métro se construit à Gaza (Mohamed Abusal), un ange franchit le mur (Raeda Saadeh), des corps voyagent dans l’espace (Steve Sabella). Chargées d’humour noir, elles nous rappellent le pouvoir des images comme acte de subversion. À l’heure où l’on célèbre tristement les 30 ans des Accords d’Oslo, tous ces artistes nous offrent des regards alternatifs, décalés sur la Palestine qui placent les Palestiniens non pas dans une position de victime, mais plutôt dans une position d’acteur, maître de sa vie. Par la création de ces récits visuels, ils créent une image renouvelée de la terre de Palestine : une terre incarnée, habitée.
La Vie des idées : La question du corps et du mouvement (souvent empêché, parfois rêvé) occupe une place centrale dans l’exposition (les fils barbelés dans « Tornade » d’Abdul Rahman Katanani ; « Un métro à Gaza » de Mohamed Abusal…) Ce thème s’est-il imposé de lui-même comme manière de lire en creux l’enfermement ou l’exil ?
Marion Slitine : L’historien Rashid Khalidi écrit que « la quintessence de l’expérience palestinienne se déroule à une frontière, dans un aéroport, devant un barrage » [12]. C’est parce que la question de la circulation – empêchée, interdite – est au cœur de l’expérience palestinienne qu’elle occupe une place fondamentale dans l’exposition et dans la création palestinienne. Les territoires palestiniens occupés depuis 1967 se caractérisent par la fragmentation et l’enfermement. Les frontières, les contraintes imposées aux déplacements des Palestiniens sont profondément ancrées dans leur quotidien, à différentes échelles[Véronique Bontemps, « Une frontière palestinienne ? La zone d’attente de Jéricho lors du passage du pont Allenby », L’Espace Politique [En ligne], 27] (checkpoints, murs, barrières, droit au retour interdit pour les réfugiés, etc.). Et que l’on soit Palestinien de Cisjordanie, de Gaza, de la « Palestine de 1948 » (actuel État d’Israël), réfugiés dans des pays arabes ou bien Palestinien de la diaspora, on n’a pas le même accès à la circulation, ce qui crée une fragmentation dans les expériences et les vies des Palestiniens, qui est une matrice de la politique coloniale de « séparer pour mieux régner ».
Le projet photographique The Braids Rebellion de Safaa Khatib aborde la question de la circulation à travers celle de l’enfermement et de la « toile carcérale » [13], en se fondant sur un événement survenu en 2017 chez des jeunes prisonnières de la prison israélienne de Hasharon. Après avoir entendu, sur une radio locale, une annonce appelant à faire un don de cheveux pour des patients atteints de cancer, elles ont coupé leurs tresses et les ont fait passer clandestinement à l’extérieur de la prison. Les détenues utilisent leur corps comme outil de solidarité, de révolte et de résistance, tout en affirmant que la vie continue, « même à l’intérieur des prisons de l’occupation ».
D’autres artistes utilisent l’humour et l’imagination pour interroger le mouvement et revendiquer un droit à la ville. C’est le cas par exemple de Maen Hammad, dans sa série Landing qui explore le potentiel libérateur du skateboard en Palestine qu’il considère comme « une forme radicale de résistance à un espace de violence, et à la domination israélienne. C’est un outil pour rassembler une communauté et surtout, un canal d’imagination. Ce projet sert d’archive à cette fenêtre de liberté, pour nous qui essayons tous de trouver notre point d’ancrage ».
Les images de Shady Al-Assar sur des jeunes de l’équipe de Parkour (art du déplacement pour franchir des obstacles avec le seul moyen de son corps) de Gaza montre aussi qu’à l’heure où tout déplacement est contrôlé voire empêché, ces acrobates tentent de retrouver un sentiment infime de liberté, d’évasion, de déplacer les limites symboliques de cette « prison à ciel ouvert » et de reconquérir leur territoire dévasté par la guerre.
Par ailleurs, l’artiste actuellement à Gaza, Mohamed Abusal imagine un Métro à Gaza qui relierait le nord et le sud de Gaza, ainsi qu’une ligne de RER qui raccorderait les territoires fragmentés de la Palestine. Partant du constat ironique que les Gazaouis « ont une certaine expertise pour creuser des tunnels », il imagine un moyen de transport sophistiqué pour « apporter une solution visuelle éphémère qui tente de transformer la situation chaotique des transports à Gaza ».
Enfin, l’œuvre The Angel de Raeda Saadeh montre le pouvoir que le mur de séparation – construit en 2002 et illégal au regard du droit international – exerce physiquement et visuellement sur le paysage. L’artiste dépeint le corps de la femme comme l’incarnation de l’acte de traverser et de refuser de se conformer au paysage colonial. Cette image comme beaucoup d’autres de l’exposition, est une invitation à se projeter dans l’avenir et un appel à l’émancipation globale.
Catherine Guesde, « Des collections en résistance. Entretien avec Marion Slitine »,
La Vie des idées
, 22 décembre 2023.
ISSN : 2105-3030.
URL : https://laviedesidees.fr./Des-collections-en-resistance
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[1] Conflit israélo-palestinien : une chape de plomb s’est abattue sur l’université française | Mediapart
[2] La guerre Israël-Hamas déchire le monde de l’art
[3] Le collectif Hawaf est composé de l’artiste franco-algérien Mohamed Bourouissa, des artistes gazaouis Mohamed Abusal et Salman Nawati, de l’architecte de Gaza, Sondos Al-Nakhala, de l’ingénieur VR colombien Andres Burbano et de Marion Slitine.
[4] Si l’IMA a accueilli pour la première fois, une exposition du musée des nuages, il sera exposé en février 2024 au Palais de Tokyo, dans une version développée.
[5] Adam Al-Mghari, Ahmed Abunada, Bayan Abu Nahla, Amal Al-Nakhala, Rawan Murad, Sobhi Qouta, Samar Sharaf, Hamada Alkept, Fouad Khater, Hala Alabssi, Hazem Alzomar, Jehad Al-Ghoul, Aboud Nasser, Enas Rayyan et Mohamed Sami Qureiqe tué par les bombardements israéliens.
[6] Krzysztof Pomian, Collectionneurs, amateurs et curieux. Paris-Venise : xvie-xviiie siècles, Paris, Gallimard, 1987.
[8] Françoise Verges, Programme de désordre absolu. Décoloniser le musée, La Fabrique, 2023.
[9] Le cactus – la seule chose qui restait après le bombardement – est un symbole de persévérance et de la résistance palestinienne.
[10] Bashir Makhoul et Gordon Hon, The origins of Palestinian Art, Liverpool University Press, 2013.
[11] Michel Agier, Gérer les indésirables, Flammarion, 2008.
[12] Rashid Khalidi, L’identité palestinienne : Construction d’une conscience nationale moderne, La Fabrique, 2003.
[13] Depuis 1967, le passage par la prison a marqué l’expérience collective d’environ 40% des Palestiniens. En 2021, on compte 4500 prisonniers politiques palestiniens. Voir Stéphanie Latte Abdallah, La toile carcérale. Une histoire de l’enfermement en Palestine, Bayard Editions, 2021.